Chez Isolation Élite inc., un plan de relève multigénérationnel permet d’assurer le succès futur de l’entreprise.
Par Jessica Kirby • Photos courtesy of Isolation Élite Inc.
Lorsque les propriétaires d’Isolation Élite inc. ont commencé à songer à la retraite, ils savaient qu’il leur faudrait planifier leur départ et faire preuve d’innovation. « Nous ne voulions pas simplement mettre la clé sous la porte de cette entreprise dont nous sommes si fiers », explique Mathieu Hamel, directeur général et l’un des trois représentants commerciaux de la société. « Il était important pour nous de connaître et de faire confiance à la personne qui allait prendre la relève. »
Isolation Élite inc. a été fondée en 2003 par Patrick Levesque et Richard Filion. En 2007, Mathieu Hamel a rejoint l’équipe de direction de la société, qui comptait alors 14 employés. Aujourd’hui, Isolation Élite inc. est présente dans tout le Québec et emploie 74 personnes.
Lorsque les propriétaires ont commencé à réfléchir à un plan de relève, M. Levesque, cofondateur et auparavant président de l’entreprise, a eu une idée. Pourquoi ne pas sélectionner certains acteurs clés, au sein même de la société, pour former une équipe qui pourrait racheter l’entreprise sur une période de huit à dix ans?
Le choix de ces acteurs a été à la fois stratégique et rationnel. Maxime Proulx, qui compte 13 ans d’expérience comme estimateur, est devenu le nouveau président de l’entreprise. Sylvain Labine, fort de ses 35 ans d’expérience en tant que chargé de projet, a pris la vice-présidence. Jonathan Guérin, associé possédant 11 ans d’expérience comme estimateur, s’est joint aux propriétaires ainsi que Jonathan St-Maurice, associé et gestionnaire de projet depuis 12 ans.
« Dans notre secteur d’activité et dans notre entreprise, chaque membre est un élément clé de l’équipe », explique M. Hamel. « Nous avons choisi ces quatre personnes en raison de leur expérience et de leur formation. »
En effet, au Québec, la seule façon d’apprendre à dresser des devis d’isolation, c’est de se former sur le tas. En l’occurrence, MM. Proulx et Guérin ont rejoint l’entreprise à la fin de leurs études et ont été formés par M. Levesque. « Il n’est pas question de laisser partir ces gars-là », déclare M. Hamel. « Pour constituer une équipe solide, nous avions besoin de personnes capables d’assumer la responsabilité des tâches qui nous incombaient, de superviser la situation sur le terrain et d’assurer la production. »
Les propriétaires ont donc entamé des discussions avec ces acteurs clés au début de l’année 2020 et leur ont proposé d’acquérir 25 % des actions pour commencer. « De ce fait, ils ont pu accepter notre proposition, qui ne nécessitait qu’un investissement minime », explique M. Hamel.
Et ils n’ont pas hésité. Entre les quatre, ils ont racheté 25 % des actions avec les bénéfices de l’entreprise et ont obtenu un prêt bancaire pour acquérir les actions restantes. À l’origine, la transaction devait s’étaler sur huit ans, mais bien que les conditions financières de l’accord aient dû être modifiées, les vendeurs ont décidé de se retirer et de conclure plus tôt que prévu.
Le plan de relève a été modifié en décembre 2023. « Nous leur avons donné la possibilité de racheter l’ensemble de l’entreprise plus rapidement que prévu et tout le monde a approuvé cette nouvelle idée », raconte M. Hamel. « Lorsque nous avons examiné les chiffres, nous sommes arrivés à la conclusion que le prix nous convenait et que nous voulions vendre à cette équipe d’employés que nous apprécions. »
La transaction a été conclue le 1er octobre 2024.
Les nouveaux propriétaires endossent progressivement les responsabilités des dirigeants, en suivant un plan clairement défini, sous la supervision de l’équipe de direction précédente. M. Levesque est devenu conseiller stratégique et s’occupe des contrats et de la planification des projets. M. Filion a conservé son ancien rôle de chef de projet et travaille toujours sur le terrain pour encadrer les apprentis. M. Hamel est resté directeur général et continue de superviser les finances, les relations publiques avec l’AIQ, l’ACIT, le milieu des ingénieurs et les principaux clients.
« Les nouveaux propriétaires travaillent dans l’entreprise depuis plus de dix ans et sont très compétents dans leur domaine », explique M. Hamel. « Nous les accompagnerons dans leur rôle de dirigeants au cours de l’année à venir, tout en continuant à remplir les mêmes responsabilités quotidiennes, afin de garantir une transition en douceur. »
Ce plan de relève a l’avantage de donner à des employés expérimentés et engagés la possibilité de devenir propriétaires: ce sont des personnes qui ont le dynamisme et la volonté de reprendre l’entreprise sans avoir à assumer une lourde charge financière initiale.
« Nous n’avons pas d’enfants qui souhaitent reprendre ce type d’activité et nous voulons voir notre entreprise prospérer et se développer à l’avenir », explique M. Hamel. « C’est formidable de pouvoir compter sur des personnes aussi compétentes pour continuer notre projet. »
Trois des quatre nouveaux propriétaires sont « nés et ont grandi » dans le milieu de l’isolation, et ont fait carrière chez Isolation Élite inc. M. Labine connaît M. Lévesque et M. Filion depuis la fondation de l’entreprise.
« Sylvain était mon client lorsque j’étais vendeur pour POLR », se souvient M. Hamel. « Il avait une autre entreprise, et lorsque Pat et Richard démarraient, Sylvain leur confiait des contrats, quand il était trop occupé. Un jour, Sylvain a frappé à la porte et a été embauché comme chef de chantier. »
M. Hamel recommande à toute personne qui dispose de l’équipe adéquate et souhaite de voir son entreprise croître et se développer à l’avenir de planifier la relève de cette façon. Sa seule mise en garde concerne le décalage générationnel, qui exige de faire preuve d’ouverture d’esprit. Dès le début, la nouvelle équipe a participé à la prise de décision, les anciens ayant un droit de veto.
« Nous sommes trois représentants commerciaux d’une cinquantaine d’années et cela fait 30 ans que nous faisons les choses de la même manière », explique M. Hamel. « Aujourd’hui, avec les nouvelles générations arrivent d’autres idées, valeurs et façons de faire, et cela peut générer des désaccords. Il est donc important d’en être conscient et de faire preuve d’ouverture d’esprit et de respect. Il y a eu une courbe d’apprentissage au début, mais depuis, tout se passe bien. »
Il est également important de se tourner vers les bons professionnels, ceux qui ont de l’expérience, comprennent les réglementations provinciales, les avantages fiscaux, les stratégies fiscales, ainsi que les conséquences juridiques concernant l’acheteur et le moment où l’on vend l’entreprise.
Un fiscaliste peut conseiller sur les avantages et inconvénients de la participation aux bénéfices par rapport à un versement unique, aider les acheteurs et les vendeurs à définir la structure et le type de transaction les plus appropriés, et contribuer à l’optimisation fiscale.
« Il est préférable de se faire aider pour rédiger le contrat papier le plus équitable possible », souligne M. Hamel. « Cela prend un peu plus de temps, mais c’est plus facile et tout le monde a l’esprit tranquille. » ▪